Sortir : Le théâtre, le cinéma, les séries et chroniques TV et maintenant le one-man... Une préférence ?
Claudia Tagbo :
Par rapport à ça généralement, les gens ont tendance à tout cloisonner... moi, je vois pas les choses comme ça, je ne cloisonne pas : tout ça fait parti du métier. C'est pareil pour vous dans votre job : radio, télé, presse écrite, vous êtes journaliste point. Moi, je suis comédienne et j'essaye de le faire à bloc, tout est dans le même sac, tout est pareil, tout est parfait ! Traduire des sensations, toucher les gens, c'est ce que j'essaye de faire... et dans un spectacle comme dans un film, le but du jeu c'est d'incarner des personnages.

Sortir : Et comment ça s'est passé ce passage au one-man ?
C. Tagbo :
Il y a eu la rencontre avec Jamel et Kader Aoun (elle est passée par le Jamel Comedy Club), ça a été un vrai tremplin c'est clair. Partir là-dessus, c'était un exercice pour moi, je l'ai pris comme ça. J'ai toujours voulu être comédienne... après je vous ai déjà répondu en début d'interview, on vous a vu là, tout ça, être comédienne, c'est sous toutes ses formes, la palette d'un artiste doit être large. En fait, le stand up, c'est comme un monologue, à l'image de ce qu'on peut voir dans une pièce classique, sauf que là ça peut réagir dans la salle, et alors il faut rebondir... Je ne me suis jamais dit "je veux absolument faire ça", c'est venu davantage au fur et à mesure des rencontres : ça a été 10/15 minutes en première partie de Jamel, et puis on m'a demandé si j'avais pas des petites histoires à raconter, j'ai dit ok on y va, ça s'est fait petit à petit... et puis je bosse avec Fabrice (Eboué) qui écrit très bien. Là, j'en suis à une heure vingt, parfois une heure trente, ça avance !

Sortir : Ça sonne comme un gros aboutissement tout de même dans votre parcours...
C. Tagbo :
C'est d'abord un grand plaisir. Dailleurs, c'est ce que je racontais à une jeune fille il y a dix minutes : elle me disait "dans ton spectacle, on a l'impression que tu vis les choses". En fait dans la vie, je suis tellement gourmande que je mange d'abord tout ce que j'ai dans mon assiette, entièrement, seulement après je passe à la suite... pas tout en même temps ! Je remercie tous les jours le grand coordinateur : c'est sûr il y a eu des mains tendues, mais si derrière il n'y a pas de travail, comme pour la bande du Jamel Comedy Club, on aurait déjà tous disparu. Moi, j'ai envie d'apprendre : je sais pas faire, tu me donnes la chance de le faire, j'en profite.

Sortir : Et vous en profitez à fond...
C. Tagbo :
L'énergie, elle est là : on vit, il ne faut être blasé de rien. Mais rien n'est acquis, il faut aller le chercher : la porte s'ouvre, on la pousse, parfois on force pour passer le derrière, et on montre qu'on a envie ! Par exemple, vous, vous prenez le temps de faire une interview, je me dois d'avoir la patate et de vous la communiquer ! On a la chance d'être en vie, donc quand on sort de chez soi, il faut avoir la patate ! Et les jours où on est pas bien, on reste chez soi, moi c'est comme ça que je fais.

Sortir : Votre vie d'ailleurs, on la découvre dans le spectacle.
C. Tagbo :
Comme dans tout premier one, on parle de soi : mon arrivée en France, mes ressentis en tant que femme, en tant que "trop péchu" des fois... parce que parfois on me dit que c'est trop, mais je triche pas ! Je n'ai rien à cacher, je parle de ma vie très librement, je suis comme ça : ça sert à rien de tricher, sinon à un moment ça pète.

Sortir : Comment vous vivez la relation directe avec le public sur scène ?
C. Tagbo :
Avoir le public pour moi toute seule, c'est cool. Je suis comme un bébé : les gens prennent leur place, attendent après moi... Et puis derrière, il y a la rencontre, les échanges tout au long du spectacle, même un jeu questions/réponses pour qu'on discute un peu directement. Et puis pour certains qui restent, on se voit à la fin, on parle, on se fait des bisous.

Sortir : Des bisous, de l'énergie, de la joie de vivre... vous vivez tout au présent ou vous avez toujours des rêves ?
C. Tagbo :
Si je devais tout vous les énumérer, vous attraperiez mal au poignet à prendre les notes ! Non avant tout, c'est embrasser toujours la vie et par rapport à la scène continuer à aller à la rencontre du public, qu'il continue à me suivre. Et bien sûr j'ai envie de jouer avec de grands comédiens, auprès de grands réalisateurs... Mais d'abord c'est quand vous aurez fini d'écrire votre papier, que vous donniez encore plus envie aux gens !